Date(s)

  • 1-2 août 2014 – Contemporary Performances Festival – Drodesera (IT)
  • 8-12 juillet 2014 – Festival de la Cité – Lausanne (CH)
  • 27-28-29 septembre 2013 – Steirischer Herbst – Graz (A)

Vidéos

https://player.vimeo.com/video/118687093

Gym Club

Un projet steirischer herbst et Numéro23Prod./Massimo Furlan (août/septembre 2013)

Thème
Une vie en trois temps
Surnommé le « Chêne autrichien » (Austrian Oak), Arnold Schwarzenegger est né le 30 juillet 1947 à Thal bei Graz. Il est donc lié à l’histoire de la ville de Graz, à son identité. On trouve par ailleurs à Thal un musée à son nom, composé de diverses reliques, relatant les étapes de son parcours de vie. Etonnant de construire un monument pour un homme encore parfaitement en vie: n’est-ce pas l’édification d’un mausolée?
Fils d’un ancien officier de l’armée autrichienne avec lequel il sera toujours en conflit, il est ainsi, par ses origines, héritier de l’histoire tragique du pays, de la guerre, de son passé violent. Dès l’âge de 13 ans, il se passionne pour le culturisme et commence des entraînements intensifs. Il cherche à se distinguer, à devenir différent, en usant de son corps, de son physique. En 1966 il gagne le titre de Mr Europe, puis celui de Mr Univers. Peu attaché à sa famille, il la quittera rapidement pour partir à Munich.
On distingue trois grandes périodes dans la vie de Schwarzenegger: la première, liée au culturisme, l’homme muscle; la seconde, durant laquelle il devient acteur et joue dans plusieurs films d’action, dont les fameux Terminator; enfin la période politique, où il est élu gouverneur républicain de l’état de Californie.
Une vie en trois temps, trois parcours, trois tentatives. A chaque fois il atteint le sommet de ce qu’il a souhaité, et il devient extrêmement populaire. Personnage hors norme, il est aussi perçu par le plus grand nombre comme une figure à la limite du risible, du ridicule. On pourrait imaginer trois projets s’articulant autour de ces trois thématiques.

Un corps hors norme
Dans ce cas précis, pour 2013 et pour le steierischer herbst, c’est la première partie de la vie de Schwarzenegger qui va nous intéresser: celle du culturisme, du body building. La question du corps musclé, sculpté, du corps pour soi, en soi, qui est son propre but. Non pas un corps outil qui serait travaillé dans la perspective d’obtenir des résultats dans une discipline comme le 100 mètres, le marathon, ou encore le lancer du poids, la lutte, etc. Non, il s’agit ici d’un corps qui ne fait rien que d’explorer ses propres possibilités. Le corps, dans le culturisme, est conçu comme spectacle, pure monstration. Les muscles sont stimulés pour produire des courbes, des reliefs, une sorte de paysage. Dans une dépense inutile, et gratuite. Mais ce corps provoque l’effroi, il dégage une sorte de monstruosité. C’est un corps hors norme, hyper développé, jusqu’à ses états limites, qui se tient au maximum de ses possibilités: c’est un corps réellement performant.

Le culturisme, finalement, est une pratique exclusive qui est à l’origine, dans les années 80, de la multiplication des salles de sport, du fitness, ce qui révèle le souci constant et quotidien d’un corps contrôlé. D’une pratique spécifique, on passe à une préoccupation beaucoup plus large et globale: chacun, chaque jour, se trouve trop gros, trop maigre, pas assez musclé, etc. Le souci de son apparence, de l’image que l’on donne, est au coeur de chacun de nos choix, de nos décisions, de nos penchants. L’homme contemporain, qui n’utilise presque plus son corps dans son activité quotidienne, qui ne s’en sert pas comme d’un outil nécessaire à l’exécution d’un certain nombre de tâches, a pris l’habitude de se surveiller, de soumettre son corps et son image à une discipline constante.

Ce qui nous intéresse dans ce projet, c’est donc la modification du corps, de l’apparence et de l’identité du sujet à travers une gestuelle spécifique, une suite d’exercices. Il s’agit de regarder la séance de culturisme sous l’angle de la chorégraphie, comme un événement, une suite de poses, visant l’esthétique et non le combat ou la démonstration de force physique. La question du culturiste est donc organisée en deux temps: le premier consiste à développer le plus de muscles possible, en particulier ceux dont on ignore totalement l’existence et la fonction. C’est un travail d’intensification, selon une technique de tension continue, avec contraction du muscle tout au long du mouvement. Tout muscle étant susceptible d’être développé, ceci implique une gestuelle des plus improbable. Le but du culturisme étant d’acquérir une masse musculaire la plus dense possible, il existe des techniques et des règles précises, comme les repas très fréquents, un grand nombre d’heures de sommeil, l’ingestion de produits dopants, la pratique d’une multitude d’exercices de lever de poids, de tensions, contractions, etc. Dans un deuxième temps, c’est la question du spectacle, du concours: montrer ce corps musclé, le présenter, avec des poses spécifiques, des figures, des gestes, devant un public et un jury d’experts.

Soirée d’adieu, soirée de gym
Le projet autour de Schwarzenegger devrait se passer dans une salle de gymnastique. Les spectateurs sont invités à passer dans les vestiaires. Là, les hommes et les femmes sont séparés. Ils doivent se changer et enfiler des vêtements de sport mis à leur disposition: shorts, joggings, t-shirts, de couleurs extravagantes.
Nous sommes en 1966, le soir précédant le départ de Graz d’Arnold pour Munich.
Dans la salle de gym, les spectateurs se retrouvent, et commencent un échauffement avec des moniteurs. Ils effectuent une série de gestes en musique. Puis, peu à peu, au milieu des spectateurs, des figures se détachent du public, et prennent des poses spécifiques. Le public ressent alors un sentiment paradoxal: celui d’être et ne pas être dans l’image, dans le spectacle. Peu à peu les spectateurs sont invités à s’asseoir sur des tapis de gym. Ils voient alors se dessiner des images, des bribes, une histoire. Celle d’un homme qui entreprend une course effrénée à la beauté, à la perfection, à la force. Une sorte de rêve, sans mesure. Les corps se transforment, les muscles se tendent, se gonflent, grossissent de manière inquiétante, comme des prothèses monstrueuses. Les personnages se déplacent dans l’espace de jeu et forment des suites de gestes, de chorégraphies, de tableaux. Des histoires se tissent entre certains personnages, des affinités, des joutes, des compétitions, de la jalousie. Au plus profond de chaque histoire, le désir de séduction, la recherche de la «perfection».
La situation est burlesque, l’imagerie grotesque: les images qui se construisent évoquent les parades de foire, les décors en carton pâte, les présentations dans le style des freak show, les défilés de mode extravagants.
C’est une soirée d’adieu, dans une société de gym locale, les participants forment une petite communauté: on fête le départ d’un homme qui se distingue, qui déjà apparaît comme différent, et qui deviendra une star, sur le plan international.