Date(s)

  • du 18 au 25 juillet 2008 – "Sujet à vif", Festival d'Avignon – France

Vidéos

https://player.vimeo.com/video/118694252

Chanteur plutôt qu’acteur

un projet de Massimo Furlan, Claire de Ribaupierre et Marielle Pinsard
Festival d’Avignon/Sacd. NUMERO23Prod. (CH)
Création: 17 au 25 juillet 2008, Festival d’Avignon

Un débat sur la question de l’identité et de la filiation dans les arts de la scène

Le concept

Pour cette production, ni Massimo Furlan ni Marielle Pinsard ne proposent pas une création théâtrale. Ils réagissent à la programmation du Festival d’Avignon, ainsi qu’au lieu de production : le titre, « Sujet à vif », évoque directement la question du débat, de la table ronde, d’une discussion à plusieurs autour d’un thème d’actualité qui concerne les festivaliers d’Avignon et le monde des scènes artistiques contemporaines. Le lieu, le Jardin de la Vierge, n’est pas étranger non plus au contexte du débat lui-même.
Avec cette proposition, il s’agit de manipuler une forme chère au public français, le débat, et en particulier de s’insérer dans le registre des discussions fréquentes et récurrentes concernant l’histoire d’Avignon et de son festival.
Les protagonistes invités par Massimo Furlan et Marielle Pinsard, proposent des réflexions et hypothèses à partir d’un thème tronqué :
« Pourquoi Jean Vilar, grand homme de théâtre et fondateur du Festival d’Avignon en 1947, a-t-il eu un fils qui a choisi non le théâtre, mais la chanson, à savoir Hervé Vilard ? »
Spécialistes de la question de la transmission, de la généalogie, philosophes, historiens, acteurs, s’interrogent ensemble sur différents points :
– Le comédien de théâtre, même le plus connu, est un parfait inconnu pour le grand public, qui ne saurait le reconnaître en le croisant dans la rue. Celui-ci rêve bien des fois de quitter sa carrière pour devenir chanteur de rock ou chanteur de variété afin de toucher des milliers de spectateurs et être ainsi adulé de tous.
– Ce quasi anonymat des hommes de théâtre, qui existent par leur nom, mais dont le visage est inconnu (soit parce qu’il ne cesse de changer, comme c’est le cas d’une comédienne de théâtre, soit parce qu’il n’apparaît pas sur scène, ce qui est le cas du metteur en scène), sera exploité dans le sens suivant : Massimo Furlan et Marielle Pinsard usurpent l’identité de Roméo Castellucci et de Valérie Dreville, qui sont censés participer au débat en tant qu’artistes associés du festival. Ils empruntent un nom, quelques caractéristiques minimales (le fait d’être une femme d’origine française, une actrice de théâtre pour Marielle Pinsard et Valérie Dreville, le fait d’être un homme d’origine italienne et d’avoir fait une formation en arts plastiques pour Massimo Furlan et Romeo Castellucci). A partir de ces indices minimaux, tout est possible.
– La question de l’héritage à transmettre, du père au fils, du père comme modèle et du fils cherchant à se libérer de ce modèle ou au contraire à s’y conformer est une question qui traverse notre histoire occidentale, et en particulier l’histoire de la chrétienté, à travers l’histoire exemplaire du Christ.

La forme
Pour répondre à la question « Pourquoi chanteur plutôt qu’acteur ?», nous proposons une formule modulable : des invités différents chaque jour nous rejoignent, ce qui permet au débat d’être tous les jours nouveau et de garder une forme totalement performative.
D’autres part, ce projet est mené par un(e) authentique meneur de débat de radio expérimenté et non pas par un acteur.
Nous suivons de manière sérieuse la question du protocole, propre au débat et à la table ronde. L’animateur radio présente ses invités selon leur fonction et leur compétence. Le discours de présentation fait foi et donne toute crédibilité à l’orateur. L’animateur a préparé un certain nombre de questions qu’il pose à ses invités, en relation avec les idées et positions des intervenants et de la thématique à aborder : à savoir la question de la filiation, de la transmission, de la distinction et, de manière plus spécifique, du choix d’une carrière : chanteur plutôt qu’acteur. Donc chaque invité répond à la question du débat, rebondit sur les réponses des autres, selon sa compétence.
Chaque jour, le débatest différent, en fonction des invités, de leur interaction, et des questions posées. Plusieurs canevas sont dessinés au préalable, et selon leur agencement, modifient le déroulement de l’image.

L’image : le dérapage et la crise
Une fois assis dans le gradin, le spectateur prend le projet au sérieux et il est peu à peu envahi par le doute sur la question du débat et sur l’identité des personnages présents.
Tout d’abord, il est face à un dispositif classique du débat: quelques chaises, quelques micros, une petite table, une table de mixage, un piano.
Cette image est peu à peu envahie par toutes sortes de parasites et parasitages de différents types :
– personnages inattendus : apparition de la Vierge à la fenêtre du couvent, dans son jardin, avec l’enfant Jésus (bébé), et avec son fils adulte (Jésus à la fin de sa vie).
– problèmes inhérents à la technique : problèmes de micro, larsens, bruits divers, pannes…
– jeu sur les règles du débat et les accidents : le meneur de débat n’écoute pas les réponses, les intervenants ne répondent pas aux questions, le meneur du débat perd ses notes et s’embrouille.

Le lieu et les enjeux
Pourquoi la présence de la Vierge et de Jésus ? A cause du lieu d’abord, dans ce jardin-là, le Jardin de la Vierge, il faut bien imaginer une apparition, une incarnation. Magnifique cour, couvent, plein air : un cadre bucolique.
Et parce que, dans la question de la filiation, la figure du christ est centrale : un fils exemplaire, un père absent, une mère très visible. Les débatteurs en parlent également dans leur intervention.
L’intérêt du débat, hormis la question tronquée, Vilar/Vilard et l’idiotie de son intitulé (chanteur plutôt qu’acteur), pose des questions essentielles : le rôle des pères, la question la transmission, de la différence, de l’héritage, l’identité et la construction de soi. Le débat met également en scène l’usurpation des rôles, la réalité et la fiction, etc. Il parle aussi de la culture des classes : culture savante (Jean Vilar) et culture populaire (Hervé Vilard), qui se rejoignent à travers le passionnant jeu des patronymes et de leurs orthographes (voir Georges Perec), à la différence d’un « d ».
Chanteur plutôt qu’acteur exploite donc une image type, celle de la table ronde, connue de tous, et en propose toutes sortes d’anecdotes, d’accidents, et de dérives. Il s’agit de détourner une forme spécifique de représentation et de se la réapproprier. De là naît une nouvelle image, beaucoup plus baroque, étrange, énigmatique, chaotique et burlesque, qui parle du détournement (détournement d’un dispositif) et de la croyance (croyance et foi dans les orateurs spécialistes, foi dans le sérieux du débat lié à la transmission radiophonique et au dispositif professionnel de la présentation, foi dans le protocole, etc.)

Avec la participation de:
Massimo Furlan, Marielle Pinsard, Karelle Ménine, Claire de Ribaupierre, Philippe de Rham, Thomas Hempler
Bernard Stiegler, Serge Margel, Hervé Vilard, Marc Augé, Philippe Mesnard, Alessio Moretti, Romeo Castellucci, Pierre-Olivier Dittmar, Valérie Dreville

Une coproduction:
Festival d’Avignon, Sacd, Paris

Soutiens:
Loterie romande, Etat de Vaud, Pro Helvetia – Fondation suisse pour la culture, Ville de Lausanne