Date(s)

  • 10, 11 et 12 mai 2012 – Arsenic hors-les-murs, Patinoire de Malley – Suisse
  • 3 et 4 septembre 2011 – La Bâtie - Festival de Genève – Suisse
  • 8 et 9 juin 2011 – Schillertage, Mannheim – Allemagne

Vidéos

Schiller Thriller

un projet de Massimo Furlan et Claire de Ribaupierre
Schillertage de Mannheim; Arsenic, Lausanne; La Bâtie – Festival de Genève; Théâtre de la Cité Internationale, Paris; NUMERO23Prod. (CH)
Création: 9-10 juin 2011, Théâtre National de Mannheim, Festival Schillertage.

Thème

Massimo Furlan et Claire de Ribaupierre ont été invités par le festival Schillertage de Mannheim à créer en juin 2011 un spectacle inspiré par l’œuvre de l’auteur allemand Friedrich von Schiller. Le projet a pour point de départ la leçon inaugurale prononcée par Friedrich Schiller à l’Académie d’Iéna, lors de son entrée en fonction en tant que professeur. Cette leçon de type académique porte sur la question de l’histoire et du progrès historique de la civilisation européenne de la fin du 18e siècle. Schiller dresse un portrait enthousiaste de l’éducation, de la société civilisée, des sciences et de la philosophie. Héritier des Lumières, il affiche une foi sans limite pour l’idée de progrès, progrès de l’homme éduqué, instruit, au commencement du capitalisme, de l’industrie et de la colonisation. Dans ce discours rhétorique et académique il n’est question ni des femmes ni des enfants, si ce n’est comme des êtres destinés à progresser, à « grandir », à entrer dans le système afin de le faire prospérer. Il est question des peuples extra-européens, « sauvages » et des animaux, comme des populations témoignant des origines de l’histoire, destinés à servir l’Europe, à suivre son modèle. Héritier de la pensée éclairée, de la foi en la raison et dans le jugement tel que Kant l’a instauré, et contemporain de Goethe, son maître, Schiller s’inscrit dans ce premier romantisme allemand qui s’avère classique au niveau de l’écriture, académique, et qui croit en la vertu des Idées et des valeurs morales. Le discours se veut optimiste et rassembleur. Ce texte est prononcé en 1789, au moment de la Révolution française. Pourtant de nombreuses questions présentes dans l’oeuvre dramatique de l’écrivain sont écartées de ce texte: la question de la violence, de la tyrannie, du meurtre, de la folie. Questions que le romantisme allemand met en évidence et traite de manière percutante: la nature, l’instinct, l’excès, la déraison et la révolte sont au coeur des oeuvres d’Hölderlin, Novalis, Büchner ou encore Nietzsche.

Cette foi en la raison éclairée qui traverse le discours de Schiller, typique de la fin du 18e siècle, s’avère pour nous aujourd’hui naïve et aveugle sur ses propres fondements : elle est dominatrice, capitaliste, européo-centriste et machiste. Cette raison et cette foi en une histoire universelle encourageant les hommes à dominer le monde et à imposer leur modèle, aveuglés par l’idée d’un horizon lumineux, conduira en fait, comme le montreront Adorno et Horkheimer, à la folie de l’Occident, au massacre, à la destruction de l’altérité, et de la nature elle-même.
Aussi le projet Schiller Thriller cherche à la fois à mettre en perspective cette pensée et ses contradictions, ses croyances et ses craintes dans une suite d’images symboliques, oniriques ou burlesques, dans un dispositif installatif qui devrait constituer une expérience de perception singulière pour le spectateur (l’obscurité, l’éloignement puis la proximité, le murmure des voix et la puissance de la musique, le déplacement dans l’espace,…).

Espace

Il s’agira, selon les configurations de nos partenaires, soit d’une grande surface scénique, type opéra, soit d’une très grande halle industrielle. Ces deux types de lieux conviennent au projet, à savoir que ce qui est essentiel c’est une très grande ouverture de scène et une profondeur importante de l’espace scénique, afin de pouvoir faire surgir des personnages depuis le lointain, dans la nuit, et que leur marche jusqu’à la lumière soit longue. Le public se trouvera dans une disposition non conventionnelle. Nous souhaitons privilégier une relation particulière du spectateur avec les images qui s’ouvrent devant lui. Le spectateur pourra, à un moment donné, se déplacer dans l’espace, faisant lui-même partie du dispositif. De plus, à l’entrée public, il découvrira une image qui aura déjà commencé, comme s’il entrait dans une installation. Pas de rideau, pas d’attente, pas de début.

Images

Les figures
De l’espace vaste, large, profond et sombre, surgissent lentement des figures parfois burlesques parfois étranges et énigmatiques. Ces images font référence à des moments précis de l’histoire universelle que l’on trouve dans le discours tenu par Schiller : ce sont des figures types, des sortes de figures modèles, des exempla. On peut aussi les comprendre comme des fantômes qui hantent l’espace, surgissant de la pensée de Schiller ; reflets d’un monde qui soit abondent dans le sens schillérien soit alors le démentent et le démontent, comme des cauchemars, des images refoulées, des remords. Les figures des femmes, des enfants, des vieillards, des «sauvages», prennent possession de l’espace, font vaciller l’auteur et son système. Ce sont aussi en quelque sorte les personnages des tragédies de l’auteur, Karl et Carlos, personnages excessifs et violents, meurtriers, révolutionnaires, ou encore des pères âgés, infanticides et sévères (Philippe II, Maximilian von Moor), des traitres (Franz, Albe), des femmes séduisantes, aimées mais abandonnées (Amalia, Elisabeth).

Le principe de composition
La question de l’organisation des images entre elles est très importante. Nous aimerions mettre ces images dans une perspective qui contredise le système « éclairé » de Schiller : à savoir la linéarité, l’idée chronologique de l’histoire qui est orientée vers un progrès, un horizon. Ces images contrarient l’idée d’un commencement et d’une fin. Elles jouent avec le principe de la reprise et répétition, la question du recommencement et de la boucle. Elles sont proches de l’organisation mythologique basée sur le cycle, le cercle. Nous aimerions en quelque sorte que le spectateur entre dans une représentation qui a déjà commencé et qu’il quitte des images qui semblent recommencer ; qu’il assiste, en tant que spectateur, à la fois à quelque chose de l’ordre du « déjà vu » et du recommencement. Mais qu’il n’en soit pas tout à fait certain, puisque les images subissent de légères variations ; à l’intérieur des images elles-mêmes, nous aimerions mettre en jeu des boucles à l’intérieur d’une boucle. Système de « loop » qui rende compte d’un monde qui piétine et recommence mais qui en réalité ne va nulle part, un monde qui passe par un certain nombre d’étapes, mais ces étapes ne témoignent ni d’un progrès ni d’une amélioration. Elles sont interchangeables.

Le sens des images
Les images en elles-mêmes sont polysémiques, elles sont de nature complexes, parfois contradictoires. Une scène peut sembler nous conduire dans une direction, mais soudain son développement nous mène dans un sens opposé, et contrarie notre attente. Nous voulons introduire le doute, le questionnement dans l’esprit du spectateur qui ne peut pas se fier à ses premières impressions. L’image est longue, et dans sa lenteur elle se transforme, pour surprendre, dérouter, faire exploser la linéarité. Les images n’éclairent pas, elles s’assombrissent. Les corps se croisent, solitaires ou en groupes, se déplacent selon des trajectoires qui leur sont propres. Comme indifférents les uns aux autres: sorte de corps-mondes, autistes, proches de la folie. Chacun fait un certain nombre d’actions, dont on ne comprend pas la motivation. Se dégage une impression de trouble, d’inquiétude. Le spectateur, à un moment donné, se trouve face à une rupture du dispositif, et il est alors invité à se lever de son siège, à quitter sa place pour se déplacer dans l’image, il se mêle alors aux corps des performers, il fait partie de la scène soudain et brouille l’image.

Mode de travail

Les répétitions de Schiller Thriller se sont déroulées en mai 2011 à Lausanne avec les membres de la compagnie, puis à Mannheim avec 25 figurants amateurs recrutés sur place, en vue des représentations des 8 et 9 juin, dans le cadre des 16e internationale Schillertage.
A l’automne, le spectacle sera recréé sur la base des images créées à Mannheim, pour s’adapter à la salle du Faubourg, dans le cadre du Festival de la Bâtie, les 3 et 4 septembre. Les figurants ont été recrutés en Suisse romande, et participeront également aux représentations de ce spectacle à Lausanne, en mai 2012, à la Patinoire de Malley (programmation Arsenic hors-les-murs). Enfin, le spectacle sera également recréé au Théâtre de la Cité Internationale de Paris au printemps 2012, avec des figurants parisiens.

Massimo Furlan et Claire de Ribaupierre.

Distribution:
Mise en scène: Massimo Furlan
Dramaturgie: Claire de Ribaupierre
Chorégraphie et travail du mouvement: Anne Delahaye, Diane Decker et
Young-Soon Cho Jaquet
Régisseur plateau et direction technique: Thomas Hempler
Création lumière : Antoine Friderici
Création musique : Stéphane Vecchione
Ingénieur du son : Philippe de Rham
Scénographie : Massimo Furlan
Costumes : Cécile Delanoë
Perruques et maquillages : Julie Monot
Construction objets volants: Minizepp/CH
Assistante de production: Milena Buckel

Avec : Anne Delahaye, Diane Decker, Young-Soon Cho, Nicolas Leresche, Stéphane Vecchione, Thomas Hempler et 28 figurants amateurs

Une coproduction:
Schillertage de Mannheim ; Arsenic, Lausanne; Théâtre de la Cité Internationale Paris; La Bâtie – Festival de Genève

Soutiens:
Loterie romande, Etat de Vaud, Ville de Lausanne, Pro Helvetia – Fondation suisse pour la culture, Pour-cent culturel Migros, Banque Cantonale Vaudoise, Corodis, Fondation Leenaards